Intelligence artificielle (IA)
L’utilisation de l’IA associé aux données visuelles pour (semi)automatiser la classification des photos de pièges-photos est une technique qui gagne rapidement en intérêt. La classification par IA peut utiliser des réseaux de neurones, qui sont des algorithmes mathématiques qui mettent en correspondance un objet d’entrée avec une sortie. Un exemple d’objet d’entrée pertinent est une photo, la sortie étant une classification pour cette photo. L’optimisation d’un de ces algorithmes pour une tâche est souvent appelée calibration et nécessite des données étiquetées correspondant aux objets d’entrée utilisés par le réseau final pour faire une prédiction. Dans le contexte du piégeage-photographique, cela signifie qu’il faut disposer d’une vaste collection de photos de référence étiquetées. Pendant la calibration, les algorithmes sont mis à jour de manière itérative afin de minimiser la fonction de perte. La fonction de perte calcule la différence entre la sortie prévue du réseau (l’animal que le réseau considère comme le plus probable) et l’étiquette d’entraînement (l’animal réel sur la photo). Ce processus se poursuit de manière itérative, soit pendant une durée prédéfinie, soit jusqu’à ce que la performance souhaitée (par exemple, un seuil de précision de la classification des espèces) soit atteinte sur la base de données de validation.
La fondation KORA utilise de manière extensive des pièges-photos pour suivre de façon systématique les populations de carnivores en Suisse en particulier le lynx et le chat sauvage qui peuvent être identifiés grâce aux motifs de leur pelage qui est unique chez chaque individu. Par leur mode de vie, ces espèces cibles ne constituent qu’un faible pourcentage des prises de vue. Un grand nombre d’autres espèces de mammifères sont ainsi photographiées par les pièges-photos mais leurs photos sont rarement exploitées. L’évolution technologique rapide des pièges-photos et leur utilisation à large échelle génèrent désormais d’énormes quantités de photos en peu de temps, une opportunité qui a créé un défi majeur : comment extraire rapidement et à un coût raisonnable des informations utiles pour la conservation ou la gestion de l’ensemble de ces espèces à partir de cette grande quantité de données brutes ?
Pour relever ce défi un consortium qui représente un regroupement unique d’institutions académiques et de centres de compétences nationaux confrontés à la même problématique a été formé. Ceci a permis par la même de réunir un ensemble de données d’une diversité et d’une quantité exceptionnelle. Des entreprises qui traitent des données provenant des pièges-photographiques en Suisse ont également été invitées à se joindre au consortium. Celui-ci comprend ainsi des écologistes, des biologistes et des gestionnaires de la faune qui ont des années d’expérience dans le traitement des données issues du piégeage-photographique ainsi que des experts en apprentissage machine (machine learning) et des développeurs de solutions informatiques. La solution envisagée consiste à adapter les derniers développements des méthodes d’IA conjointement avec l’ensemble de données inégalé et spécifique au domaine du consortium pour la calibration des modèles.
L’analyse des données issues du piégeage-photographique comprend quatre tâches exigeantes et chronophages :
- la suppression des images représentant des activités humaines, une exigence légale pour protéger la sphère privée ;
- l’identification des images vides des suites de déclenchements intempestifs par exemple ;
- l’identification des espèces représentées et finalement
- l’identification des individus des espèces naturellement marquées tel que le lynx et le chat sauvage.
Actuellement, les spécialistes humains bien formés effectuent ces tâches principalement manuellement.
Cette approche permettra de libérer d’importantes ressources humaines, actuellement occupées à des tâches manuelles et à la gestion de données brutes, pour, plus important encore, réduire les délais d’exécution afin de rendre les approches basées sur le piégeage-photographique pertinentes pour la surveillance et la protection de la faune en temps réel.